Friday, March 8, 2013

Un jour ordinaire



Je me lève ce matin avec autant de motivation que la veille, me demandant encore si je vais tenir debout où si la douleur qui me lancine le bas du dos depuis 15 jours va cette fois me garder au lit.

Debout, les pieds souffrant comme ceux de la petite sirène, il me semble marcher sur de grandes sabres en attendant que mon corps entier se réveille.

Après la pause technique obligatoire, les yeux encore clos, je me glisse dans la salle de bain et quand mes pieds touchent le fond de la baignoire, Gaspard (le petit chat tout noir et tout fou, aussi appelé Blacky), d’un bond me rejoint.

J’ouvre doucement les robinets et l’eau arrive jusqu’à ses coussinets. Il recule, recule et soudain, j’ouvre le robinet de pluie et l’eau tombe du ciel sur ma peau et Blacky s’enfuit : suffisamment d’émotion pour ouvrir l’appétit, c’est l’heure des croquettes.

Je referme les yeux pendant que l’eau douce et filtrée, sans plus de calcaire qui agresse ma peau, réchauffe mon corps et la salle de bain toute entière.



Lavée, réveillée, il faut trouver de quoi s’habiller. Je erre nue dans la maison, à la recherche d’une tenue correcte et confortable pour me rendre au travail.

Un jean m’habille et je constate, non sans plaisir, que 3kg en moins, ça ce voit, ça se sent. Merci Weigh Watchers ! En même temps, ils me remercient sûrement aussi pour les 15 € par mois qu’il faut payer pour accéder au journal de bord où je dois lister tout ce que je mange et qu’il convertit en points m’indiquant si je peux encore manger ou s’il est temps de faire un peu d’exercice pour gagner quelques points !

Habillée, enfin, je me dirige vers le lieu de réfection…. Salle à manger pour moi, chambre du chien qui y trouve ses jouets, sa niche, sa gamelle… n’empêche, à quoi lui sert cette énorme niche ici quand il préfère dormir partout ailleurs dans la maison, surtout notre chambre la nuit ?

Sur ces considérations, arrive Doudou… Bonne fête ma chérie !

Je jette sur lui un regard sombre (à tout ceux qui l’ignorent, tant que le rituel du matin n’est pas terminé –pipi, douche, déjeuner- faut pas me parler, je mors !).

Sachant pertinemment qu’il n’y a pas de Sainte Sioux au calendrier, mauvaise je lui réponds : c’est la fête des gourdes aujourd’hui ?

Ah ? t’es une gourde ?

Je ne réponds pas, on arrive sur un terrain glissant où mon réveil en douceur risque d’être compromis….

Mais pourquoi me parle t’il le matin quand je ne suis pas réveillée ? C’est vrai, à part me dire, je t’aime ma douce, ton petit déjeuner est prêt ma princesse, tu veux encore un peu de jus d’orange mon ange ?, pourquoi me parle t’il ?

Le seul truc que je tolère, c’est la radio le matin, TSF Jazz qui me berce en douceur de musique. Quoi que, à la réflexion, j’ai trouvé que ce matin il y avait quand même plus de pubs que d’habitude… et puis les pubs, sont plus agressives qu’avant, de celles que je hais sur les autres stations de radio…

Ce qui est nul à la radio, c’est que comme il n’y a pas d’image, tu ne peux pas couper le son pendant la pub pour le remettre dès que revient la musique.

Je m’éloigne de la tablette posée sur la table et d’où sors la musique (Doudou a pas de radio… y en a une dans la chambre des chats depuis que je l’ai apportée, mais dans le salon…. Faut venir avec ses jouets, sa tablette qui sert de radio, d’ordi, de cahier, de tout ce qu’on veut en somme !).

La table est salle et je prends un torchon pour la nettoyer quand super Doudou revient et me dit qu’il va la nettoyer. Toujours mon regard noir… ok, j’ouvre le frigo, il est temps de prendre ce qu’il faut pour le petit déjeuner, puis les placards pour la tasse, le verre, le couteau, la cuillère.

Et hop.

Voilà que Doudou remet ça. Alors tu sais pas que c’est ta fête aujourd’hui ?

Mon regard sombre et moi, unis ensemble à la vie à la mort, on le regarde…. WTF serait la traduction parfaite de ce que dit en silence mon œil noir.

Il sourit, tout heureux de cette nouvelle journée qui commence, de sa trouvaille aussi sûrement…

Puis il me jette cette phrase absurde, ce mot qui fini de me mettre en colère : c’est la fête de la femme aujourd’hui !

Sourire béat sur le visage de cet homme que j’aimais…. WTF

Ce n’est pas la fête de la femme ! C’est la journée de la femme !!!! Ca n’a rien à voir. Et si tu décides de me faire un cadeau pour cette journée, je me mets grandement en colère !

Non mais merde alors !

Mon Doudou qui commet cette erreur, confondre journée de la femme, journée internationale pour les droits des femmes avec fête ! Fête de la femme, comme fête, des mères, des pères, fêtes des amoureux !

Non mais et puis quoi encore !

Peut on se permettre le loisir de transformer la journée internationale des droits de la femme, en fête ?

Et pendant que je réfléchis à ça, le nez plongé dans un livre, adossé au strapontin du tram (vous avez vu, je vous épargne le petit déjeuner, le brossage des dents et la course au tram !), je sens une étrange pression contre mon téléphone portable dans la poche de mon manteau.

Quittant des yeux le pavé qui me sert de livre, je regarde mon sac à main, en bandoulière, ouvert depuis que la maudite fermeture éclaire ne ferme plus et de ce sac, une grande main mate, paume vers le haut, vide, sort de mon sac. Mon sang ne fait qu’un tour, et dans un presque hurlement je crie « Non mais ça va pas ? Vous aviez la main dans mon sac ?!!!! »

Quel toupet, un petit bout de femme d’1 mètre 60 qui hurle sur cet homme d’au moins 1 mètre 80, debout, droit et fier, bien habillé, plutôt bel homme, qui bredouille quelque chose d’incompréhensible avec un accent qui trahit qu’il n’est pas français.

Le calme dans la rame, personne ne dit rien et je dévisage cet homme, qui garde un air innocent me faisant presque douter de ce que j’ai vu, senti… je ne le quitte pas du regard, vérifiant d’une main que mon téléphone est toujours là, qu’il ne manque rien dans mon sac.

Et il me regarde à nouveau, de façon si innocente que le doute pourrait presque m’assaillir, Vous aviez la main dans mon sac !, encore un hurlement de surprise qui ne me quitte pas. Est-ce vraiment possible que ça m’arrive là, maintenant, à moi ?

Et soudain, le tram s’arrête et une autre femme, l’invite à sortir avant qu’il ne fasse les poches de tout le monde. Je la regarde, alors c’est vrai, il avait la main dans mon sac ? A t’elle vu et rien dit avant ?

Il sort. Personne ne bouge, personne ne s’émeut. Sauf elle qui me dit de vérifier quand même qu’il n’a rien pris… mais il ne manque rien… enfin, compte tenu du désordre qui règne dans mon sac, mon énorme portefeuille est là, et la carte bleue aussi, mon chéquier, tout est là.

Comment reprendre ma lecture, mes pensées ?

Journée internationale des droits des femmes…. Face aux hommes qui font nos sac, nous volent, vous violent, nous tuent, usent de leur force pour nous faire taire, nous réduire à l’état de simples mères, vaches à lait, femmes de ménage, vagin, esclaves….

Alors non, ce n’est pas la fête de la femme, c’est une journée mise en avant pour se battre pour le droit des femmes, pour qu’elles aient les mêmes droits que les hommes, partout dans le monde. Une journée pour se souvenir de nos sœurs oubliées, lapidées, violées, méprisées, n’ayant pas même le droit de parler, enfermées dans des prisons d’or ou de béton, une journée pour se battre pour elle, pas pour s’extasier devant leur beauté plastique, ni même pour leur offrir une rose. On a que faire d’une rose quand ce que l’on demande, c’est un droit. Le droit d’être, d’exister, de vivre sans humiliation, sans avoir à se cacher, le droit de penser et de dire.

Une journée ordinaire, mise en relief par la communauté internationale, qui les mains sales de crimes qu’elle laisse se réaliser tous les jours, se donne bonne conscience en ce jour, essayant de nous faire croire qu’elle se bat pour les droits des femmes. Mais il n’y pas de victoire dans les droits des femmes que les femmes n’aient pas gagnées elles mêmes, par leurs propres batailles, parfois soutenues par des hommes, des « révolutionnaires » qui ne voient pas dans la femme qu’un animal fragile à soumettre, ni une ennemie trop forte qu’il faut écraser avant qu’elle ne les tue, mais un être humain, comme eux, doué d’intelligence et de sensibilité… avec une âme.

Journée internationale pour le droit des femmes.

 Non, ce n’est pas une fête, pas tant qu’il y aura encore des hommes pour croire que la femme n’est pas un être doué de raison et de sensibilité, un être humain à part entière, ayant les mêmes droits et les mêmes devoirs qu’un homme.
En image, roman photo de comment un mâle, même jeune, s'y prend pour troubler la tranquilité d'une femmelle qui pourrait être 5 fois sa mère au moins!
 
 
 

1 comment:

  1. Bon, tu ne peux pas me voir, mais là, je te fais une standing ovation.... j'ai l'air un peu bête parce que je suis toute seule devant mon écran, mais le coeur y est ! :) Bravo ! Bravo et bravo ! Du coup, je vais partager ton texte pour en faire profiter ceux de mes amis qui, comme ton chéri, confondent "fête" et "journée".
    plein de bisous,

    Sandra

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