Est il normal de rêver chaque matin que je n’irai pas
accomplir mon devoir, ma mission et de fantasmer l’instant délicieux où le
regard incrédule de mes responsables se posera sur un bout de papier
dactylographié au bout duquel sera apposé ma signature.
Je ne sais pas encore bien quelle signature il faudrait que
ce texte revête, celle que j’appose sur mes chèques ou celle que j’appose sur
les courriers sortants rédigés à longueur de journée au bureau ?
Raisonnable. Il faut être raisonnable.
Crise de la quarantaine anticipée ? Et de beaucoup, ne
m’imaginez pas plus âgée que je ne le suis, mais il est vrai que la crise
d’adolescence est bien trop loin pour que je puisse tenter de la prendre en
argument. Mais tiens, pourquoi entre 20 et 40 ans on aurait aucune crise à
passer sinon celle des sept ans de mariage pour ceux qui ont succombé au charme
dangereux de la conformité « marions nous à 20 ans, divorçons à 35 et à 45
donnons notre démission au monde. »
Lasse.
Je suis lasse des contraintes quotidiennes, des factures à
payer, des devoirs à faire, des trains à prendre, des mails à lire.
Une envie de liberté, réelle liberté d’aller et venir, d’être
ici ou ailleurs, d’écrire, de lire, de fuir.
Envie de mettre fin à ma mission, donner cette démission que
je fantasme chaque matin.
Je me demande un peu de patience. Chaque chose en son temps
et chaque temps pour sa chose, comme pour les places ?
Je n’ai plus de temps à perdre ici et attendre six mois
encore me paraît insurmontable. Pourquoi attendre ? Pourquoi six mois ?
Et pourquoi pas demain ?
Parce que c’est la crise, mais c’est la crise depuis 10 ans
et depuis dix ans je m’accroche à ce poste qui m’ennuie chaque année un peu
plus. Je m’accroche parce qu’il y a des factures à payer, une indépendance à
garder, des voyages à réaliser.
Je hais mon boulot. Là, maintenant, tout de suite. Je le
hais.
Non par son manque d’intérêt mais en raison de mon
incapacité à être une autre que je ne suis pas, mon incapacité à accepter ce
qui se passe, le ridicule de cette situation.
Et si tout se passait dans ma tête ? Si je n’étais rien
d’autre qu’une schizophrène. Si j’étais aveugle face à ma réalité, pensant être
méprisée quand j’étais adorée ? J’en doute. Mais c’est la où la schizophrénie trouverait
tout son sens : mon aveuglement blanc dans un monde en couleur.
Il est 15h, un mercredi après midi. Autour de moi des
collègues travaillent d’arrache pied.
Un peu plus loin, une chef discute avec un mini chef, un
expert qui se doit de répondre à toutes les questions que les fourmis
pourraient lui poser.
Je n’ai toujours pas de question à poser et ma bouche s’ouvre
en grand afin de prendre un souffle important qui réveillera ces cellules qui
cherchent à endormir mon corps, à me plonger dans un sommeil peuplé de rêves où
les monstres me disputent le droit de vivre et de me manger.
Je ne suis pas comestible. Ils l’ignorent et je m’éveille au
milieu de la nuit ayant peur du moindre recoin sombre, n’osant même pas m’approcher
de celui qui partage ma couche craignant qu’il ne soit plus lui mais un autre,
un monstre lui même qui voudrait mettre un terme à ma vie.
Mes nuits sont torturées par de mauvais rêves, mes jours
sont peuplés de questions. Non pas de ces questions que je devrais déposer dans
le bureau de l’expert qui bavarde à coté, non ; de ces questions qui me
font remettre en doute mes vocations, mon métier, mes missions.
Il est 15h et je dois cesser d’écrire ici pour écrire
ailleurs, vous laissant en suspens une histoire de Tueurs qui continue de se développer
dans ma tête et que les contraintes quotidiennes d’une femme active et
amoureuse (de la vie, d’un homme, d’un sport, de plein de choses) m’empêchent d’écrire.
Courage
ReplyDeleteMerci!
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