Wednesday, November 21, 2012

Des Missions

Est-il raisonnable en ce temps de crise d’avoir ces pensées qui m’obsèdent ?

Est il normal de rêver chaque matin que je n’irai pas accomplir mon devoir, ma mission et de fantasmer l’instant délicieux où le regard incrédule de mes responsables se posera sur un bout de papier dactylographié au bout duquel sera apposé ma signature.

Je ne sais pas encore bien quelle signature il faudrait que ce texte revête, celle que j’appose sur mes chèques ou celle que j’appose sur les courriers sortants rédigés à longueur de journée au bureau ?

Raisonnable. Il faut être raisonnable.

Crise de la quarantaine anticipée ? Et de beaucoup, ne m’imaginez pas plus âgée que je ne le suis, mais il est vrai que la crise d’adolescence est bien trop loin pour que je puisse tenter de la prendre en argument. Mais tiens, pourquoi entre 20 et 40 ans on aurait aucune crise à passer sinon celle des sept ans de mariage pour ceux qui ont succombé au charme dangereux de la conformité « marions nous à 20 ans, divorçons à 35 et à 45 donnons notre démission au monde. »

Lasse.

Je suis lasse des contraintes quotidiennes, des factures à payer, des devoirs à faire, des trains à prendre, des mails à lire.

Une envie de liberté, réelle liberté d’aller et venir, d’être ici ou ailleurs, d’écrire, de lire, de fuir.

Envie de mettre fin à ma mission, donner cette démission que je fantasme chaque matin.

Je me demande un peu de patience. Chaque chose en son temps et chaque temps pour sa chose, comme pour les places ?

Je n’ai plus de temps à perdre ici et attendre six mois encore me paraît insurmontable. Pourquoi attendre ? Pourquoi six mois ? Et pourquoi pas demain ?

Parce que c’est la crise, mais c’est la crise depuis 10 ans et depuis dix ans je m’accroche à ce poste qui m’ennuie chaque année un peu plus. Je m’accroche parce qu’il y a des factures à payer, une indépendance à garder, des voyages à réaliser.

Je hais mon boulot. Là, maintenant, tout de suite. Je le hais.

Non par son manque d’intérêt mais en raison de mon incapacité à être une autre que je ne suis pas, mon incapacité à accepter ce qui se passe, le ridicule de cette situation.

Et si tout se passait dans ma tête ? Si je n’étais rien d’autre qu’une schizophrène. Si j’étais aveugle face à ma réalité, pensant être méprisée quand j’étais adorée ? J’en doute.  Mais c’est la où la schizophrénie trouverait tout son sens : mon aveuglement blanc dans un monde en couleur.

Il est 15h, un mercredi après midi. Autour de moi des collègues travaillent d’arrache pied.

Un peu plus loin, une chef discute avec un mini chef, un expert qui se doit de répondre à toutes les questions que les fourmis pourraient lui poser.

Je n’ai toujours pas de question à poser et ma bouche s’ouvre en grand afin de prendre un souffle important qui réveillera ces cellules qui cherchent à endormir mon corps, à me plonger dans un sommeil peuplé de rêves où les monstres me disputent le droit de vivre et de me manger.

Je ne suis pas comestible. Ils l’ignorent et je m’éveille au milieu de la nuit ayant peur du moindre recoin sombre, n’osant même pas m’approcher de celui qui partage ma couche craignant qu’il ne soit plus lui mais un autre, un monstre lui même qui voudrait mettre un terme à ma vie.

Mes nuits sont torturées par de mauvais rêves, mes jours sont peuplés de questions. Non pas de ces questions que je devrais déposer dans le bureau de l’expert qui bavarde à coté, non ; de ces questions qui me font remettre en doute mes vocations, mon métier, mes missions.

Il est 15h et je dois cesser d’écrire ici pour écrire ailleurs, vous laissant en suspens une histoire de Tueurs qui continue de se développer dans ma tête et que les contraintes quotidiennes d’une femme active et amoureuse (de la vie, d’un homme, d’un sport, de plein de choses) m’empêchent d’écrire.

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