Monday, August 6, 2012

Ces vrais petits bonheurs de rien du tout

Les vrais, ceux qui vous font réaliser l'importance de ceux qu'on aime, commencent par un drame.
Mon drame: je rentre à la maison un mercredi soir, il y a quinze jours, il est 22h, je galère depuis le début de la semaine à courir après des trams qui ne sont pas là et fais du sport bien malgré moi. Doudou a une voiture que je n'ai pas et dont il n'a pas besoin. Alors en sortant du bureau, je suis passée dîner avec lui et j'ai pris la voiture.


Comme d'habitude, en arrivant j'appelle le chat. Lynn ne vient pas.

 

Il y avait encore un gris et gros matou dans le jardin. Il lui a peut être fait peur.
Je ferme les volets à grand renfort de bruit: c'est un rituel de ralliement qui veut dire: maman est à la maison, vient donc lui faire un câlin et dévorer des croquettes.
Pas de chat!
Je décide de errer dans mon potager pendants que les moustiques se jettent sur moi tels des zombies assoiffés de chair fraîche. Je me demande s'ils voudront bien épargner un peu mes yeux ou les oreilles mais ce sont les pires vampires de la planète qui se terraient ici dans mon jardin. Résignée, j'abandonne et je rentre et continue d'appeler.
Doudou ne s'inquiète pas. Il ignore que mon chat de jardin est fidèle comme mon ombre. Quand elle m'entend arriver, où qu'elle soit, elle court et vient à moi.
C'est ma partenaire domestique.
Elle partage mon quotidien depuis 5 ans, avec son p'tit caractère tout doux et rigolo, nos petites habitudes de vieux couple... Oui, oui, vous avez bien lu.
Quand à minuit elle n'est toujours pas rentrée et que des mâles en rut et en guerre hurlent devant chez moi, ni une ni deux je file les éloigner, leur demandant de rentrer chez eux, passant pour une fille qui parle aux chats ou aux ombres si le voisin qui m'a surprise n'a pas vu le chat.
Et j'attends jusqu'à deux heures du matin, ce bruit si significatif de la Lynn qui frappe à la fenêtre ou à la porte.
Rien.
À 2h du matin, je m'effondre. Je pleure, je sanglote à en perdre mon souffle, je sais la dure réalité que je ne veux pas admettre, que je trouve soudain trop dure: Lynn ne reviendra plus.
Elle n'est pas rentrée ce soir, il faut que je m'y prépare, des voleurs de chats fabricants de fourrure l'ont attrapée, une voiture l'a renversée, des gens me l'ont volée, tuée...
Je pleure d'un chagrin si fort que je n'attendais pas et que je n'ai pu exprimer ici avant.
La fatigue a raison de moi et je m'endors.
Quand le réveil sonne, un matin sans goût commence.
J'ouvre les volets encore en quête de la minette, je traîne des pieds, elle ne viendra pas se frotter à moi ce matin. Je ne lui ferai pas mon câlin en partant au bureau, je ne partagerai pas mon yaourt au petit déjeuner, elle ne va pas me suivre à la buanderie pour jouer à cache cache avec moi derrière les portes pendant que j'étendrai mon linge. Bref, ma partenaire domestique m'aura quittée et j'aurai dans la bouche le goût amer de la solitude non désirée, j'écouterai le silence de son absence, et plus aucune boule de poil ne viendra se frotter contre mes jambes nues humides à la sortie de la douche.
Ma Lynn est partie. Et chaque fois que cette phrase me revient en tête, des larmes inondent mon regard et je ne vois plus rien.
Doudou a appelé pour prendre des nouvelles. Le chagrin vient d'envahir mon quotidien.
Lynn n'est plus là et son fauteuil vide me le rappelle, son bol de croquettes qu'il faudra ranger, tous ces petits détails m'emplissent de douleur et chagrin.
Triste et sans goût, j'ouvre la porte pour laisser entrer un soleil qui brille à peine et la partenaire qui ne viendra pas.
Soudain, c'est la surprise.
Face à moi, à dix mètres, sous les pieds d'aubergines, Lynn.
En boule, elle me regarde.
Je cours dans les escaliers et je pleure de bonheur.
Lynn est là. Je l'attrape, la sert contre mon cœur et je l'apporte dans la maison et l'installe dans son fauteuil.
Elle ne bouge pas.
Elle n'a pas mangé mais elle ne bouge pas. Elle reste en boule, le poil sale, sur son fauteuil.
Je la porte à sa gamelle. Les croquettes ne l'intéressent pas mais elle boit, beaucoup, fait trois pas et se couche.
J'appelle Doudou, j'ai retrouvé Lynn.
Comme je pleure encore, il imagine sûrement le pire et il propose de venir tout de suite.
Je reprends mon souffle pour lui dire non, mais elle ne va pas bien, il faut l'emmener chez le veto et dans le quartier j'en connais pas de bon.Et c'est là que commence une autre angoisse: vais-je arriver à temps?
Lynn entre sans râler dans son panier que j'installe côté passager, ceinture attachée.
Et me voilà sur la route, à 9h du matin, partie pour une heure d'embouteillages où l'angoisse sera mon compagnon de route.
Lynn est calme comme jamais et je surveille que son ventre se soulève, je surveille qu'elle respire encore.

Je n'ai jamais passé d'heure plus terrible que celle là: avoir retrouver un être cher que je pensais avoir perdu à jamais et craindre chaque seconde que l'inéluctable va arriver.

Mais Lynn arrivera en vie chez le vétérinaire qui la prendra en charge.

J'apprendrais quelques heures plus tard, qu'elle avait de la fièvre et une plaie qu'ils opèreront le lendemain.

Le vétérinaire me dira par téléphone qu'ils ont fait une radio car la plaie ne ressemble pas à une morsure, mais à une entrée de balle... Mais il n'y avait pas de plomb dans le corps de Lynn.

Je verrai enfin ma minette le lendemain soir, en même temps que le vétérinaire, assez intrigué par la blessure qu'on ne parvient pas à déterminer comment elle est arrivée. Une plaie profonde qui menaçait de toucher les entrailles, une plaie large comme un stylo et profonde.

Aujourd'hui je me dis, comme une flèche... Mais qui oserait blesser ce chat qui aime tellement la compagnie, qui est si douce, ne se bat avec personne sinon quelque souris ou oiseaux qui se laissent attraper.


Après dix jours d'antibiotiques, dont huit avec collerette, à l'abris des attaques dans un appartement, Lynn est de retour dans son jardin, dans notre jardin. Et chaque matin quand je pars, je lui dis aurevoir, le cœur plein d'angoisse: seras tu encore là ce soir?

Et chaque soir, quand je rentre, je l'appelle et l'inquiétude s'en va quand elle revient se frotter contre moi.

Alors c'est idiot, mais mon vrai petit bonheur de rien du tout, ce sont les poils de Lynn sur mes jambes nues parce qu'elle n'a pas attendue que je me sèche en sortant de la douche pour se frotter contre moi, ce sont mes haricots verts qui s'éparpillent sur le sol, parce que Lynn trouve plus drôle de jouer avec eux qu'avec les jouets que Doudou lui achète, c'est son regard espiègle quand je descend au jardin et ses courses dans les herbes hautes pour me dire, vient on joue à cache cache ou simplement de la voir n'importe où mais pas loin de moi, juste parce que je suis là et que ce qu'elle préfère c'est être avec moi.

Mon petit bonheur de rien du tout, c'est de la voir et l'avoir quand j'ai cru que notre partenariat avait pris fin à jamais.


Et vous, c'est quoi vos petits bonheurs de rien du tout?

 

 

12 comments:

  1. une photo de mon neveu, un sms de S., des news d'une copine, des petits riens mais qui me font du bien :)

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    1. hum... des sms de S.... il y a baleine sous gravier par ici!

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  2. Oh mon dieu j'imagine tellement ton angoisse et ton soulagement !! J'ai eu des frissons à te lire (heureusement que le titre m'a empêchée de pleurer)

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    1. Chaque fois que je me relis pour traquer les fautes, j'ai la gorge nouée et les larmes au bord des yeux. Jamais je n'aurai cru qu'elle avait autant d'importance pour moi. C'est incroyable comme ces tous petits être prennent comme place dans nos vies et nos coeurs.

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  3. A lire ton article, j'ai eu les larmes aux yeux... Hâte de voir ma Minette et de lui tomber dessus en la serrant (trop) fort contre moi !
    Et quelle honte de s'amuser à faire souffrir un animal quand même...
    Bel article en tout cas !

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    1. Merci. Je n'ai aucune certitude, mais la plaie n'est sûrement pas la morsure d'un autre animal et c'est difficile de croire que mon chat s'empalle volontairement dans le bas du dos dans un grillage... donc je crains bien que des gens mal intentionnés aient eu la méchante idée de lui faire du mal...
      Merci pour ton commentaire.

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  4. Oh quel billet touchant..; Je serais folle d'inquiétude si je perdais mon chat ou s'il était blessée et malade aussi :s je suis contente en tout cas, qu'elle soit rentrée et qu'elle aille mieux :) des bisous! :)

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  5. merci. Je suis très heureuse aussi, encore plus qu'avant, chaque fois que je la retrouve.

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  6. C'est la première fois que je viens sur ton blog et ton article m'a beaucoup émue. Je suis heureuse de savoir que tout est bien qui fini bien pour toi et pour Lynn.
    D'ailleurs, un de mes vrais petits bonheurs à moi, c'est aussi une petite boule de poile, mon petit Dali(-minou).

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    1. Merci pour ta visite et ton message. Et je te souhaite plein de bonheur avec ton petit Dali, mas ça va être facile, les boules de poil ont un fort potentiel pour rendre heureux.

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  7. Tu m'as franchement tenue en haleine et j'étais heureuse de vivre en appartement et même si le filet à chat au balcon est affreux je suis super heureuse de l'avoir mis de suite. Un des bonheur de ma vie c'est Easy qui fait la tête persuadée que si mon aventurier n'est pas là c'est ma faute mais la voir demander des câlins quand même. Au fait Easy c'est mon chat...

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    1. Merci pour ton témoignage. Faut dire que là, je suis pas au bout de mes peines avec Lynn. Elle a fait une pancdréatite peu de temps après et là, elle a plus trop le droit de sortir, je surveille ce qu'elle mange. Pour qu'elle ne s'ennuie pas trop, je viens de lui trouver un nouveau jouet.... enfin, un copain, comme elle mais tout petit.
      Bientôt je fais un article photo pour présenter Gaspard.... le chaton noir qui embête Lynn ma chouquette un peu mémère quand même.

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